Une saison de Titans.
C'est une constante relevée depuis presque la toute première ère de cette planète Formule 1. Chaque armée suffisamment puissante pour maintenir sa domination sur des années et des années est aidée d'un homme dont les capacités sont supérieures aux autres. Ceux que l'on appelle des Titans sont plus forts, plus rapides, plus robustes, plus intelligents.
Mais la constante veut qu'il n'y ait qu'une de ces créatures à chaque saison. Bien-sûr l'Histoire nous a déjà montré que deux peuvent se croiser, s'affronter, et laisser des traces indélébiles dans nos mémoires, mais jamais une guerre n'aura été si dure, si serrée, et surtout, si directe. Car en général, quand deux Titans s'opposent, c'est par l'intermédiaire de leurs armées. Le Titan de l'escouade A est opposé aux hommes armés de l'escouade B, et inversement, avec au milieu possiblement d'autres unités. Mais pour la première fois, durant les 22 batailles qui auront composé cette guerre, l'affrontement était direct. Une confrontation face à face sur chaque champ de bataille.
Aujourd'hui, après avoir vécu cette guerre, et après avoir eu le temps de la revoir avec un œil plus lointain, on peut tirer des portraits assez clairs de nos deux Titans. Le premier, celui qui est à détrôner, que l'on peut considérer comme le Titan Originel : Lewis Hamilton. Son pouvoir précis semble se transmettre entre les plus grandes figures que la planète Formule 1 est connu. Les Titans Originels sont ce qui se fait de mieux : ils sont forts, rapides, mais surtout très intelligents et capables de s'adapter très vite. Le second, celui qui tend à détrôner le Titan Originel : Max Verstappen. Pour lui, on parlera d'un Titan Cuirassé. Il est robuste, très fort, et n'a peur de rien. Sa tactique ; c'est l'attaque.
Et c'est peut-être cette vision offensive de la guerre qui aura déstabilisé le Titan Originel. Car depuis le début de son ère, Lewis Hamilton n'est opposé qu'à d'excellents soldats. Il n'a jamais eu à affronter un véritable monstre. Et quand ce fut le cas, ce dernier était sur le déclin, et très proche de ses propres pouvoirs. Une façon d'agir et de réfléchir similaire, ce qui facilite l'appréhension de l'adversaire. La force de Max Verstappen, c'est cette folie qui le pousse à foncer tête baissée dans la moindre brèche que Mercedes ne colmatera pas.
La preuve en est, dès les toutes premières batailles. A Bahreïn, la tactique et la force était du côté du Titan Originel. Tout était mis bout à bout pour que l'escouade s'impose, et affaiblisse d'entrée de jeu son adversaire. Mais cela a été tout le contraire, car dès la bataille suivante, le Cuirassé a dévoilé son pouvoir. Un trou de souris laissé, il s'y engouffre, et impose ensuite sa forte carrure pour ne laisser aucune chance à son adversaire. La première de nombreuses incartades entre les lignes adverses.
Une politique offensive qui ne laisse que trop de choix au Titan Originel. Il est obligé de s'incliner, pour tenter de mieux revenir. Car s'il décide de s'imposer et de ne pas se laisser faire, l'impact est tel que l'un des deux monstres, voire les deux, se retrouvent au sol. Cela s'est vu à Silverstone, à Monza.
La guerre fut telle, qu'à l'aube de la toute dernière bataille aucun camp n'avait pris l'avantage sur l'autre. Retour à la case départ. Pas besoin de calculer, de réfléchir. Celui qui ferait flancher l'autre serait le grand gagnant. Et à la vue de cette position, on a craint à un coup bas. A l'utilisation des lieutenants des armées, à des stratégies contraires au code d'honneur que se sont imposé ces Titans. Car même si entre eux, il semblait y avoir du respect et une sorte de limite (très floue et lointaine nous vous l'accordons), ce n'était pas le cas de leurs armées respectives. Car de ce côté aussi la guerre a été rude. La seule règle entre les deux camps ? Qu'il n'y en avait pas. Ou presque.
Malgré toutes ces craintes, fort heureusement, l'ultime bataille est restée dans les règles de l'art. Et comme on pouvait s'y attendre, l'expérience, la connaissance et l'intelligence de l'Originel était finalement la solution pour remporter cette guerre. Aussi puissant soit-il, aussi courageux soit-il, et aussi incisif soit-il, le Cuirassé voyait sa campagne se solver par un échec. Un nom de plus qui allait rejoindre la liste des victimes de Lewis Hamilton.
Mais ça, c'était sans compter un troisième Titan. L'élément décisif de cette saison : le Titan Charrette. Rien à voir avec sa forme caractéristique, ni avec ses pouvoirs, ce surnom de charrette lui vient tout simplement de son incapacité à justement gérer ses pouvoirs. Une charrette. Et bien que plus tôt, nous disions que le Titan Originel était ce qui se faisait de mieux, le Titan Charrette à pourtant entre ses mains le choix de tout faire basculer, puisque son rôle est celui d'arbitre dans cette guerre. Vous l'aurez compris, nous parlons là de l'escouade FIA.
Car si les deux Titans, qui nous offraient une confrontation dantesque, étaient au sommet de leur art, ce n'était pas le cas du tout de cette troisième créature. Des attaques hasardeuses, un manque de cohérence dans ses prises de position, des tactiques plus que faillibles, et la liste peut être longue. Mais finalement, comme tout bonne histoire qui se respecte, c'est sur la fin que ce personnage secondaire est devenu le héros de ce drame. Une ultime tentative d'apaiser les deux protagonistes peut-être, qui n'a pas du tout été reçue correctement, tant la manœuvre était maladroite et contraire au code de cette guerre. Une rectification d'emblée pour se préparer de la meilleure des façons à l'ultime affrontement, et pour tenir son rang. Mais là encore, ce n'était qu'illusions, puisque c'est en fait ce Titan Charrette qui aura fait basculer la victoire dans un camp, en bafouant totalement ses propres règles.
Il y a neuf mois, commençait une guerre qui allait rentrer dans l'Histoire. Deux des plus grands Titans étaient sur le point de signer ensemble ce qui peut s'apparenter à leurs meilleures batailles respectives.
Une guerre durant laquelle ces deux monstres allaient prendre d'otage l'attention du peuple pour les emmener avec eux. Tels deux boxeurs, ils se rendaient les coups. Tour après tour, comme deux joueurs d'échecs essayant de toujours avoir un, deux, voire trois mouvements d'avance sur l'autre. Non sans l'aide de leurs lieutenants respectifs, qui allaient indirectement se mêler à cette lutte. Un affrontement si serré qu'après une saison complète de batailles aux quatre coins du monde, les deux protagonistes de ce thriller haletant arrivent au chapitre final à une égalité parfaite. Et puis que seraient des soldats au front sans un commandement derrière eux pour les guider et les épauler.
Eh bien nous voilà neuf mois plus tard. Et l'une des plus belles histoires de la planète Formule 1 est née. Peu importe l'issue de cette guerre, le résultat est historique. Le Titan victorieux aura été le meilleur. Mais son adversaire n'aura pas démérité pour autant. Bien au contraire. Quoi que l'on dise, qui que l'on supporte et quoi que le résultat soit, une chose nous mettra tous d'accord. La planète Formule 1, ses acteurs, son peuple, nous avons tous assisté à une véritable saison de Titans.
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