Nigel Mansell : L'homme des premières fois.
Si vous nous lisez depuis pas mal de temps, vous savez qu'une fois par saison, environ, il nous faut notre petit titre ambigüe et sa miniature décalée qui va avec... Et si vous nous connaissez, vous savez aussi que le thème des « premières fois » est très souvent abordé dans ces articles... On eut parlé des meilleures premières fois, des pires premières fois, aujourd'hui, il est l'heure de se pencher sur un homme qui, à de nombreuses reprises, s'est illustré, lors de premières fois, ou au travers de ses propres premières fois. Et attention, on vous voit venir, on parle bien de sport automobile...
Nigel Mansell est, dans l'Histoire de notre sport, une véritable légende. Détenteur de nombreux records en son temps, Champion du Monde, personnage public emblématique, et possesseur de l'une des moustaches les plus reconnaissables de la Formule 1, il n'est plus à présenter aux amoureux de la discipline. Non, il est plutôt à redécouvrir, sous un nouveau regard...
Vous avez deviné l'idée ; Nigel Mansell a brillé, plus d'une fois, lors de premières fois. Et par ce terme, on entend bien évidemment des premières éditions de Grand-Prix, des premières apparitions dans des championnats, dans des équipes, etc.
Ceci étant dit, mesdames et messieurs, nous vous proposons donc de (re)plonger avec nous dans les performances remarquables de Nigel Mansell, aka l'homme des premières fois.
Ses premières fois.
Le premier fait d'armes remarquable de notre héros britannique du jour, ce sont ses premiers tests dans une Formule 1. Après un titre lors de sa première saison en Formula Ford, et deux autres saisons dans des catégories jeunes, dont une, en Formule 3 britannique, un certain Colin Chapman, directeur de Lotus, souhaite offrir à Nigel Mansell une chance à bord d'une Formule 1. Comme très souvent dans sa carrière, Chapman à eu l'œil, et Mansell brille suffisamment pour qu'il se voit offrir un rôle de pilote d'essai pour la saison 1980.
C'est d'ailleurs lors de cette même année qu'il fera ses débuts officiels en catégorie reine, en inscrivant son nom sur la liste des engagés de deux épreuves. Il commence sa carrière en Autriche, lors d'une épreuve qui lui coûtera la peau du cul, au sens premier du terme, puisqu'une fuite d'essence provoque une brusque augmentation de la chaleur de l'habitacle de sa monoplace et entraîne donc des douleurs vives à cause de brulures aux fesses. Une première fois qu'il n'est pas près d'oublier...
Son début de carrière dans l'élite est bien moins rapide et glorieux que son parcours pour y arriver, puisqu'il lui faut attendre 72 Grand-Prix, soit presque 5 saisons complètes, pour que le britannique remporte sa première course. Mais vous commencez à le comprendre, Nigel Mansell ne fait pas les (premières) choses à moitié...
Direction Brands-Hatch, au Royaume-Uni, pour le Grand-Prix d'Europe 1985. Nigel Mansell a déjà connu des podiums pour ce qui s'avère être sa première saison avec Williams, 6 pour être exact à ce moment-là, mais n'avait jamais encore goûté à une victoire. Après une course mouvementée, qui le voit prendre un superbe départ, puis en perdre le bénéfice à cause d'une erreur, il profite des erreurs des pilotes devant lui, et d'un très gros rythme de course, pour s'imposer à plus de 20 secondes de son poursuivant, Ayrton Senna.
Après deux années à échouer à la seconde place dans sa quête d'une couronne mondiale, et une saison 1988 marquée par un nombre impressionnant d'abandons (12 sur les 14 courses auxquelles il a participé), Nigel Mansell quitte Williams pour signer à la Scuderia Ferrari, sur une demande personnelle d'Enzo Ferrari, chose qui n'était alors jamais arrivée auparavant. Une requête d'Il Commandatore qui portera ses fruits lors de la toute première apparition en rouge de Mansell, puisque le Britannique brille, encore une fois.
C'est au Brésil, pour l'ouverture de la saison 1989, que tout le cirque de la Formule 1 pose ses valises, comme il était légion à cette époque. On n'est pas à Interlagos, mais à Jacarepaguá, du côté de Rio de Janeiro. Qualifié 6e, Nigel Mansell remporte la course, une première pour les débuts d'un pilote chez Ferrari depuis un certain Mario Andretti, près de 20 ans auparavant. C'est aussi la première victoire de l'Histoire de la Formule 1 pour une voiture à boîte semi-automatique.
Mais ses débuts en trombe ne lui permettent pas d'aller décrocher le titre, et après deux ans à Maranello il décide de revenir chez Williams. Un choix qui paye enfin pour Nigel Mansell qui, après une première année à échouer à la seconde place, est sacré Champion du Monde en 1992. Et encore une fois, avec la manière...
Un début de saison extraordinaire avec 5 victoires consécutives, un total de 9 victoires sur les 16 possibles (un record à l'époque), à chaque fois sur le podium s'il terminait la course, un total de 14 pole positions (là aussi un record pour une saison à l'époque), le tout avec le plus grand nombre de points jamais vu jusqu'alors (108 points), qui lui permettent d'être titré dès le mois d'Août.
Un premier sacre qui n'en appellera pas d'autres en Formule 1, puisque l'année suivante il quitte l'élite suite à des désaccords avec son équipe. C'est vers le CART, ancêtre de l'IndyCar, qu'il se tourne.
Première année, première course, et première victoire ! C'est en Australie que le championnat ouvre sa saison, à Surfer's Paradise, lors d'un événement dont l'attention médiatique est alors immense. Pour preuve, près de 800 accréditations sont délivrées, uniquement pour cette course et pour la présence du Champion du Monde de Formule 1 en titre. Nigel Mansell, poleman devant un certain Emerson Fittipaldi, devient le premier pilote de la catégorie à gagner lors de sa première apparition depuis Graham Hill, un autre moustachu légendaire, lors de l'Indy 500 de 1966.
La même année, il remportera 4 autres courses et montera sur 5 podiums supplémentaires, dont une troisième place pour sa première participation à l'Indy 500. Un premier bilan comptable de 191 points qui lui permettent de décrocher le titre pour sa première saison, un exploit que personne n'avait réussi avant lui en CART.
Après une seconde saison moins glorieuse en CART, quelques apparitions remarquées en Formule 1 pour les saisons 1994 et 1995, et un détour par le BTCC (tourisme britannique) en 1998, Nigel Mansell revient dans le monde de la monoplace grâce à la création des Grand-Prix Masters, dont nous vous avons déjà parlé sur FORMULA.
Vous connaissez la chanson : Nigel Mansell débute en Grand-Prix Masters, et Nigel Mansell remporte les deux premières manches de la discipline ! Il remporte, en Afrique du Sud, la manche inaugurale, qui sera d'ailleurs la seule manche de 2005, et il réitère sa performance en 2006 pour s'imposer au Qatar lors de la première manche de la saison.
Sa dernière apparition lors d'une course de haut rang sera pour les 24H du Mans 2010, où il ne réalisera malheureusement pas l'exploit au sein d'une structure familiale composée du Champion du Monde et de ses deux fils, Greg et Leo. Ils abandonneront au bout de 4 petits tours seulement, un mal qui aura collé bien trop de fois à la peau de Nigel Mansell, victime de près de 100 abandons toutes compétitions confondues.
D'autres premières fois.
Nous avons pu observer et se rendre compte que les premières fois de Nigel Mansell n'étaient pas banales. Mais le Britannique n'aura pas été qu'acteur de ses premières fois, puisqu'il aura aussi été un élément important de nombreuses autres premières fois : celles des premières éditions de Grand-Prix... Nous en avons relevé quatre, dont deux sont en France, et deux en Espagne.
Direction le Grand-Prix d'Espagne 1986. Après deux éditions au cœur de Barcelone (1951 et 1954), et, entre 1967 et 1981, 15 ans d'échange entre Jarama et Montjuïc, le grand cirque de la Formule 1 décide de s'installer à Jérez sur un circuit très moderne pour son époque. Les Qualifications laissent entrevoir une domination franche d'Ayrton Senna, mais c'était sans compter sur deux éléments perturbateurs : Alain Prost, son meilleur ennemi de toujours, et Nigel Mansell, notre héros du jour.
À la moitié de l'épreuve, tout le monde comprend que la victoire va se jouer entre ses trois pilotes qui, dès lors, ne se lâchent plus d'une semelle. Nigel Mansell décide de rentrer aux stands pour chausser des pneus plus frais quand Alain Prost, de son côté, perd du rythme à cause d'une usure pneumatique trop importante. Senna s'envole alors seul en tête de la course. Grâce à de nouvelles gommes et à un rythme de fou furieux, Nigel Mansell parvient à doubler, non sans difficultés, Alain Prost, puis à se rapprocher d'Ayrton Senna alors qu'il accusait près de 20 secondes de retard. Dans le dernier virage, les deux voitures sont collées, Mansell se décale pour tenter de remporter la course, mais il lui manquera 0.014 secondes.
À l'issue du fabuleux spectacle fourni par le Britannique, les journalistes se pressent autour de lui pour lui poser des questions, notamment sur les défenses agressives de Prost et de Senna. Bon joueur, Mansell ne fustige personne, et propose même aux instances de l'époque d'attribuer 7,5 points à lui et à Senna pour qu'ils soient considérés comme co-vainqueurs de l'épreuve.
Même s'il ne gagne pas en 1986 pour la première édition d'un Grand-Prix à Jérez, il corrigera ce manque en 1991 lorsque ce même Grand-Prix d'Espagne déménagera à Barcelone, sur le circuit de Catalunya.
Sur une piste détrempée, Mansell tombe de la P2 à la P4 assez rapidement. Il se reprend tout aussi vite pour remonter, double Schumacher et se rapproche de Senna qui l'avait donc déjà privé du succès lors de la manche inaugurale de Jérez. Dans une bataille devenue légendaire, les deux pilotes avalent la ligne droite côte à côte, dans une pluie d'étincelles. Un duel qui tournera à l'avantage de Mansell, mais pas pour longtemps, puisque lors du passage aux stands des pilotes pour chausser des gommes sèches, Senna reprend la position. À vrai dire, Mansell perd même plusieurs positions, au profit d'autres pilotes s'étant arrêté plus tôt. Plus tard durant l'épreuve, la pluie fait son retour, et plusieurs pilotes partent à la faute, dont Ayrton Senna. Nigel Mansell est le plus régulier, le plus agile, et le plus rapide, et il va logiquement s'offrir la victoire du premier Grand-Prix d'Espagne tenu sur le circuit de Catalunya.
Mais avant cela, retour en 1986, quelque temps après Jérez. Direction le pays frontalier au Nord de l'Espagne : la France. Le plateau de Formule 1 pose ses valises au Paul Ricard, un circuit qu'elle connaît plutôt bien, seulement deux mois après le décès d'Elio de Angelis sur ce même tracé lors d'essais. Afin de ne pas faire prendre des risques inconsidérés aux pilotes, les organisateurs décident de réduire la distance du circuit, et d'emprunter la version "Club" de ce dernier.
Sur cette version utilisée en Formule 1 pour la première fois, Nigel Mansell s'élance en première ligne, au côté d'Ayrton Senna. Décidément, un duo destiné aux premières fois... Le Britannique prend le meilleur sur le Brésilien et installe une petite avance. Après quelques tours, Andrea de Cesaris est contraint à l'abandon, mais laisse sur la piste un peu d'huile. Les deux leaders ne parviennent pas à éviter le résidu, Mansell maitrisant sa monoplace quand Senna, lui, en perd le contrôle. C'est ensuite une course pleine de maitrise menée par le Britannique et son équipe, qui effectueront un arrêt de plus qu'Alain Prost, mais qui profiteront donc de gommes plus fraiches en fin d'épreuve.
Comme pour l'Espagne, c'est en 1991 que la Formule 1 change de destination pour le Grand-Prix de France. Le plateau de cette saison se rend alors à Magny-Cours pour la première fois.
Nigel Mansell s'élance depuis la 4e position alors que son coéquipier, Riccardo Patrese, est en pole, et qu'il est devancé par Alain Prost et Ayrton Senna. Après un départ désastreux de Patrese qui le fait retomber P10, Alain Prost mène la course, devant son public, et devant Nigel Mansell. Après quelques tours à lui mettre la pression, le Britannique profite de la présence de retardataires pour attaquer le Français à l'épingle d'Adélaïde, et s'offrir la première place. Mais lors de la première salve d'arrêts, Mansell doit rendre la tête de la course à Prost suite à un souci aux stands, et se lance donc de nouveau à sa poursuite. Même virage, même situation, mais c'est cette fois-ci par l'extérieur que Mansell attaque et passe Prost. Cette fois-ci c'est la bonne pour notre héros du jour, puisqu'il part remporter sa première course de la saison 1991.
Cette victoire est la 17e de la carrière de Nigel Mansell, ce qui lui permet, à cette époque, de devenir le Britannique le plus victorieux de toute l'Histoire de la Formule 1 devant un certain Sir Stirling Moss. Un record qui est aujourd'hui bien dérisoire au vu du nombre hallucinant de victoires d'un autre chevalier de sa majesté : un non moins certain Sir Lewis Hamilton...
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