Le Bilan : FFSA F4 2022.
Après un final controversé et sous haute tension en 2021, la FFSA Formule 4 avait pris pour décision de compter sans exception tous les résultats de l’année, sans décompter les pires. Et pourtant, malgré cela, un peu de controverse subsistera sur l’attribution du titre 2022. Hugh Barter a outrageusement dominé la saison jusqu’à ce que la tornade Alessandro Giusti ne l’égale puis le batte en toute fin d’année.
Si tous les résultats de l’Australien, déjà 2e l’an passé, avaient été comptés, il aurait été champion, mais voilà, en faisant de la F4 espagnole dans le même temps, il s’est engagé à ne pas marquer de points à deux manches (en raison d’un avantage injuste sur les autres pilotes en termes d’expérience sur les manches de Spa et Valencia, où passe aussi le championnat ibérique). Ainsi, c’est le Français Alessandro Giusti qui lui arrache le titre, un an après avoir décroché le titre Junior.
Les champions.
Il était tout seul sur sa planète sur la première moitié de saison. Hugh Barter (17 ans) a remporté sept des huit premières courses principales, et sept des huit premières poles positions. Au-delà du résultat, la manière et l’avance qu’il avait sur la concurrence étaient tout simplement monstrueuses. Cela compensait une première moitié de saison plus délicate de l’autre côté des Pyrénées où il a subi la domination de son jeune coéquipier Nikola Tsolov.
Mais paradoxalement, quand Barter a commencé à s’améliorer en Espagne, sa domination est devenue moins forte en France. Cela était l’œuvre d’un jeune Français fêtant tout juste son 16e anniversaire : Alessandro Giusti. Comme l’an dernier, le Francilien a vécu une première moitié de rodage, ne luttant « que » pour la 2e place au mieux. Mais au sortir de la pause estivale, Giusti s’est métamorphosé, claquant notamment les six dernières pôles de la saison.
Alors oui, Giusti n’a pas gagné les six courses en question, et il s’est contenté de parfois marquer les gros points ou d’éviter d’attaquer Barter comme à Valencia, sachant très bien que son rival australien ne marquait pas de points. Quel aurait été l’intérêt de l’attaquer et de tout perdre ? Giusti l’avait bien compris. Mais non content de filer vers le titre comme cela, il a signé un dernier meeting autoritaire au Paul-Ricard, quand Barter, pour la première fois de la saison, ne marque aucun top 2 sur les trois courses.
En deux années, Hugh Barter a fait trois saisons pour trois titres de vice-champion (2 fois en France, 1 fois en Espagne). Si le fait de manquer les titres lui fera garder un goût amer au sortir de 2022, il peut déjà regarder devant. Fort de son énorme expérience en F4, l’Australien devrait rejoindre Campos en FIA F3. Un tout autre challenge. Son rival, Alessandro Giusti, comme Masson, David ou Martins avant lui, rejoindra la FRECA, très probablement chez G4 Racing, après des premiers tests très prometteurs (quelques tops 6).
Les challengers.
Ces deux-là pourront avoir des regrets ! Souta Arao (17 ans hier !) et Elliott Vayron (16 ans) luttaient avec Alessandro Giusti pour la 2e place derrière Barter avant la pause estivale. Et quand le Francilien a explosé, ils n’ont pas su élever leur niveau de pilotage, stagnant et continuant à se battre ensemble pour les 3e et 4e places du championnat.
Jeune pilote Red Bull, le Nippon Souta Arao sortait de la même école qu’Ayumu Iwasa et décrocher le titre comme son aîné deux ans plus tôt était l’objectif. Alors il y a eu des moments intéressants, avec notamment une pole et deux victoires, mais le terrible Dr. Marko s’attendait peut-être à mieux. Cela reste une saison très satisfaisante pour Arao qui découvrait l’Europe et la France après un entraînement intensif au Japon. Assez pour Red Bull ? Son nom ne circule pas dans les discussions en FRECA ou en F3. Un passage en Super Formula Lights, comme Ren Sato, vice-champion F4 FFSA 2020 derrière Iwasa, est envisageable.
Finaliste FEED Racing, Elliott Vayron avait enflammé la F4 française avec trois victoires en trois manches l’an dernier, en débarquant en cours de saison. Alors voir Vayron finir 4e, sans la moindre victoire, est un peu décevant. Lui aussi à la lutte avec Giusti et Arao, il a été régulier, mais pas étincelant. Son avenir en monoplace s’est considérablement obscurci, et une nouvelle année en F4 ne semble pas dans les plans du Français. Mais FEED a montré qu’elle pouvait révéler des pilotes se battant pour le titre. Alors le Canadien Kevin Foster, vainqueur cette année, sera à surveiller en 2023.
Les Rookies.
Certains pilotes ont surpris, notamment du côté des rookies. Sans entraînement intensif comme les pilotes japonais de la Suzuka Racing School, deux rookies sont sorti du lot : Enzo Peugeot (17 ans dans deux jours) et Jeronimo Berrio (16 ans).
Forcément, ses débuts en monoplace étaient attendus, après le titre de Champion de France FFSA Junior de karting en 2020. Enzo Peugeot a répondu aux attentes : cinquième, avec deux victoires. Cependant, deux points noirs : le Français a manqué de performance en qualification, ce qui paradoxalement l’a aidé à profiter des grilles inversées et donc à marquer des gros points, l’essentiel de ses unités venant de ces courses-là. Aussi, on aurait aimé voir une vraie progression et le voir rivaliser avec Vayron, Arao voire Barter et Giusti sur la fin d’année. Pour chercher le titre l’an prochain, il faudra encore s’améliorer.
Lui n’était absolument pas attendu : le Colombien Jeronimo Berrio a semblé sortir de nulle part, mais a montré une superbe progression. Hors du top 15 à Nogaro, il a commencé à se battre pour les points au weekend suivant, puis pour les podiums, et enfin pour la victoire ! Et c’est peut-être ça le plus important : au début de la saison, tout le monde part avec une expérience plus ou moins grande. Ce qui compte, c’est la progression, ce qui permet de voir le potentiel d’un pilote. Et Berrio a vraiment impressionné sur ce côté. Il doit encore apprendre à canaliser son énergie en piste parfois, mais il aura le temps de le faire, vraisemblablement en F4 espagnole chez MP Motorsport.
Romain Andriolo (16 ans) termine 10e de sa première saison de F4. Assez irrégulier, on l’aura vu briller lors des courses à grille inversée notamment, mais aussi à Valencia où il est monté sur son premier « vrai » podium. Louis Pelet (18 ans) est plus âgé, mais découvrait la monoplace. Après un début d’année compliqué, comme un Berrio (en plus petite proportion), il a progressé de façon linéaire, finissant par se battre pour les points à chaque course, montant sur son premier podium au Castellet.
C’est malheureusement un peu l’inverse pour le Belge Lorens Lecertua (16 ans), qui a commencé la saison pied au plancher avec un podium à Nogaro, avant de rentrer un peu plus dans le rang. Le futur pilote Alpine Europa Cup quittera la monoplace l’an prochain, mais le contingent belge sera toujours représenté avec Yani Stevenheydens, vainqueur du Volant RACB Road to F4.
J’attendais beaucoup mieux d’Edgar Pierre (16 ans), après des essais de pré-saison fantastiques. Classé 13e, il a pêché en Qualifications, mais a constamment impressionné en course, dynamitant le peloton par ses remontées. Le benjamin du peloton, Max Reis (15 ans), a été intéressant, en témoigne son podium à Pau, mais a manque d’expérience et surtout, de force physique. Une seconde année, peut-être avec le soutien de l’ADAC, pourrait être intéressante.
Les autres.
Lui aussi pilote Red Bull Junior, Yuto Nomura (17 ans) est passé au travers de sa première année en FFSA F4. Septième, l’impression générale laissée n’est vraiment pas bonne et il semble impossible de voir le Dr. Marko continuer à croire en lui. Redoublant, Pierre-Alexandre Provost (16 ans) est une énigme, capable du meilleur comme du pire. Le très irrégulier Franco-Luxembourgeois passera en FRECA chez G4 Racing l’an prochain, mais subit déjà la comparaison face à Giusti...
Le suisso-hispano-ukrainien Dario Cabanelas (16 ans) a été plus lisse que Provost avec des hauts moins hauts, et des bas moins bas. Pas grand-chose à dire, hormis que le step par rapport à son année 2021 n’est vraiment pas énorme. C’est mieux qu’Enzo Géraci (tout juste 16 ans), qui, malgré son jeune âge, a déjà terminé sa deuxième saison de F4, à une très moyenne 14e place. Les espoirs vus en fin d’année dernière n’ont pas été concrétisés.
Enfin, l’Équatorien Mateo Villagomez (20 ans) a eu un joli milieu de saison, sans suite malheureusement. Parti de très loin, Enzo Richer (16 ans) a bien fini l’année, accrochant quelques points. Les éclaircies de Pablo Sarrazin (fils de Stéphane) et du Panaméen Valentino Mini, ont été beaucoup trop rares. Lény Réveillère et Pol Lopez décrochent des points inespérés. L’Indien Amir Sayed n’est pas passé loin. Antoine Fernande et Luciano Morano étaient trop loin du compte, même si ce dernier pourrait continuer l’aventure en F4 espgnole...
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On a eu une superbe année de FFSA Formule 4 : des belles histoires, des révélations. Encore une fois, la FFSA a réalisé un travail incroyable pour permettre à ce championnat en pleine expansion d’offrir une équité la plus parfaite possible. Que les grilles d’une petite quinzaine de pilotes de la période COVID semblent loin !
L'année 2023 s’annonce encore intéressante, mais il devrait y avoir plus de candidats que d’engagés au final. Le succès de la F4 française ne se dément pas, en témoigne la récente annonce de l’ADAC allemand d’arrêter son championnat et d’envoyer ses pilotes en France, dans un championnat qui, par son modèle unique au monde, est si attractif dans un contexte où les coûts en sport auto ne cessent d’augmenter, allant parfois à une surenchère sans limites comme en F4 Italie par exemple. Alors merci, et bravo.
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